Bayrou, prophète… en son pays ?

Les Français se trouvent au pied du mur : ou bien opter pour une vérité peu sexy compte tenu des circonstances ; ou bien continuer à préférer le maquillage outrancier sous lequel ils savent que la fille qu’on leur présente n’est pas aussi jolie qu’on le prétend.

« Depuis le général de Gaulle en 1958, […], aucun candidat n’est parvenu à se faire élire avec un programme de vérité. » Ainsi s’exprime Sylvie Pierre-Brossolette dans Le Point du 15 mars 2012 qui, au-dessus du portrait de Bayrou, titrait : « Le prophète ».

Quand on lit le dossier consacré au candidat du centre, on s’aperçoit que ce n’était pas ironique. En fait, Bayrou se distingue des autres candidats par le peu de promesses qu’il fait. Pour moi, c’est un argument positif : plus il y a de promesses, plus il y aura de promesses… non tenues. Bayrou essaye de ne prendre que des engagements tenables ; et même cela sera difficile -par exemple gérer le personnel de l’État à budget constant.

Faute de vision…

Il est frappant de constater que les « grands » candidats sont des calculatrices à parole. Derrière leurs chiffres, souvent contestables, la pensée ou ce qui en tient lieu est indigente. Hollande nous ressort le catalogue de la bien-pensance socialiste, par exemple en voulant supprimer le mot « races » de la Constitution (faudra-t-il supprimer les mots « homme » et « femme » pour faire plaisir à certains lobbies ?…) ; il serait plus opportun de réfléchir à ce qu’est ou n’est pas le concept de race plutôt que d’en nier l’existence. Toujours cette volonté de niveler les différences tout en les exaltant : c’est dans l’air du temps. Côté Sarkozy, de pensée, point : les virages à 180 degrés du Líder Mínimo en sont la preuve flagrante, s’il en fallait encore une après cinq années passées à disloquer notre pays faute d’en avoir une vision.

Bayrou pense, parle et écrit. D’aucuns en tireraient argument pour dire qu’il est incapable de gouverner. Le Parisien disait, le 15 mars 2012 : « C’est un peu quitte ou double. Il tire la campagne vers le haut, au risque d’apparaître plus comme un penseur qu’un acteur de la société.  » Certes. Mais l’un n’empêche pas l’autre. Je dirais même : l’un est le carburant de l’autre. S’il fallait en citer deux exemples, celui du poète Václav Havel, devenu « président-philosophe » de la Tchécoslovaquie, en serait un (Bayrou a assisté à ses obsèques). L’autre, c’est Nelson Mandela, qui fut un activiste, un président et un sage pour le plus grand bien de l’Afrique du Sud (je le tiens même pour le plus grand héros du XXe siècle).

Voilà pourquoi Bayrou, qui a relu de Gaulle, plaide pour un projet de société : « Il n’y aura pas de marche en avant s’il n’y a pas de cap », affirme-t-il (Libération du 14 mars 2012).

Pourquoi les Français placent-ils François Bayrou en tête des personnalités les plus appréciées, à 60% (en hausse constante), alors que les sondages, même inexacts, le donnent entre 11 et 15% dans les intentions de vote ? Eh bien c’est parce qu’ils veulent des miracles : Guéris nos écrouelles ! Augmente le SMIC ! Améliore nos retraites ! Protège nos bas de laine ! Fais des miracles ! Descends de la croix ! Fais un miracle puisque tu vas à la messe !

Pire encore : nos compatriotes veulent des miracles auxquels ils ne croient pas… mais auxquels ils veulent croire…

Changer de mentalité

Si cette équation bancale parvient à se résoudre, si les électeurs se décident pour un langage de vérité (je n’ai pas dit : une pensée infaillible), l’élection est gagnée pour Bayrou.

« Pour être prêt à espérer en ce qui ne trompe pas, il faut d’abord désespérer de tout ce qui trompe », écrivait Bernanos. La France est-elle assez désespérée pour préférer aux brutes et aux illusionnistes celui qui dit la vérité ? C’est ce que nous verrons.

Pierre Mendès-France était de cette race-là (oh ! pardon, M. Hollande). Il n’a gouverné que sept mois, mais il s’est forgé une légende méritée d’intégrité et de droiture politique. Jimmy Carter n’a fait qu’un mandat comme président des États-Unis. Aujourd’hui, il est universellement respecté après avoir été beaucoup méprisé.

Je parierais volontiers que, si François Bayrou devient président de la République française, il ne fera qu’un mandat. Mais permettons-lui de le faire ! Des déceptions, il y en aura, c’est certain. Mais il n’est plus supportable d’être gouverné à la schlague par des gens prostitués aux valeurs monétaires, même pas au service de tous, mais à celui de leurs amis riches. Et si la France repassait aux mains des socialistes, elle serait certes un peu plus humaine, mais trop encombrée de casseroles (il fallait écouter Montebourg, Mme Aubry !) et trop empesée de slogans de pure idéologie, qui contraindraient François Hollande à faire marche arrière toute en moins de temps que Mitterrand n’a dû le faire au début des années 80.

Bayrou a un programme pensé, réaliste, qu’il convient de lire et, pourquoi pas, de méditer. Actuellement, les intentions de votes semblent s’équilibrer, notamment grâce à Jean-Luc Mélenchon. Cela fait tomber l’argument du « vote utile », qui a tellement nui à Bayrou. Le temps est venu de retrouver une France fraternelle, juste, courageuse et vraie.

Philippe Malidor

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